Brendan Kelly cultive la patience. Parfois, en plein hiver, il brave le froid et l’humidité. Il se lève avant même que l’aube embrase le littoral et les marais de Terre-Neuve, sa province natale. Il est levé bien avant ses modèles, les oiseaux.
Chargé de kilos d’appareils photo, Brendan Kelly avance à marche forcée dans le paysage tamisé jusqu’au panorama qu’il avait déjà repéré. Il s’étend de tout son long, parfois pendant des heures, sur le sol gelé ou la glace impitoyable. Pendant tout ce temps, il scrute, grâce à son viseur, une faune riche en potentiel en attendant qu’elle soit prête pour le moment décisif.
Il attend l’arrivée de son modèle : un oiseau de mer, un canard ou un prédateur surgi de nulle part. Il connaît leurs rituels, leurs habitats et leurs horaires. Il espère être récompensé de sa patience. Il attend le canard non pas où il est, mais plutôt là où il sera.
Soudain, en l’espace d’un instant, la lumière, le battement d’une aile ou la curieuse inclinaison de la tête correspondent tout à fait à ce qu’il attendait.
Brendan Kelly appuie sur le déclencheur et capte, grâce à son appareil photo, l’instant magique, qui s’envole aussitôt.
« Bien souvent, je capte ces scènes au moment même où je suis sur le point d’abandonner parce que j’ai trop froid ou que je ne suis vraiment pas à l’aise. Et c’est lorsque je m’encourage à rester un peu plus longtemps que je capte la scène parfaite», confie-t-il.
Il a la chance d’avoir grandi à Paradise, à Terre-Neuve-et-Labrador, entouré du paysage varié et accidenté de cette province. Dès son plus jeune âge, il s’est épris des oiseaux, de leurs habitudes et de leurs habitats. Quand il a eu 11 ans, il a constaté que l’habitat régressait à vue d’œil. Son père et lui se sont donc mis à construire des nichoirs pour les hirondelles, les nyctales de Tengmalm et d’autres espèces.
En 2013, ses précoces travaux de conservation lui ont valu le Prix du mérite attribué par Canards Illimités aux Héros des milieux humides de Newalta. Ce prix lui a permis d’étendre le territoire où il installait ses nichoirs.
C’est ce travail qu’il poursuit aujourd’hui. Et pour donner une tournure nouvelle au vieux dicton sur la conservation, partout où il va, il ne laisse que des nichoirs et ne prend que des photos, éclairées par des années d’observation des habitudes de ses modèles chéris.
Aujourd’hui, il fait des études de baccalauréat en conservation de la faune à l’Université de l’Île-du-Prince-Édouard. Il a choisi cette orientation en raison de sa passion et de son talent de photographe.
« Après avoir observé ces différents animaux pendant des années et leur avoir consacré tant de temps, on finit vraiment par les apprécier et avoir une vue d’ensemble », explique-t-il.
Voici les images qu’il a patiemment captées. Nous vous invitons aussi à lire les articles qui expliquent ces images. Ces instantanés, ce n’est pas à la chance qu’il les doit, et ils n’ont rien d’ordinaire non plus. Car la chance, dit-on, sourit à ceux qui sont prêts. Et Brendan Kelly est un photographe extraordinairement bien préparé.

En photographiant un groupe de canards colverts et de canards d’Amérique à Paradise, j’ai eu la chance de capter cette image d’un canard souchet. Cette espèce n’est généralement pas répandue à Terre-Neuve.

Cette image représente l’un de mes meilleurs souvenirs de la faune. Après avoir gravi plus de 800 mètres jusqu’au sommet du mont Gros-Morne, le deuxième point le plus haut de Terre-Neuve, quelques amis et moi avons observé plusieurs caribous. Et c’est ce caribou des bois mâle qui a volé la vedette!

Ce grand-duc d’Amérique femelle vient tout juste de livrer un lièvre d’Amérique à ses deux oisillons affamés avant de se reposer dans un sapin en attendant une averse de pluie. La puissance et l’élégance mêmes de cette espèce en font un de mes modèles préférés.

J’ai capté cette image dans le Jardin écologique Fletcher, à Ottawa en Ontario. Je suis toujours étonné de constater que des représentants de la faune comme ce castor prospèrent dans les milieux humides urbains.

En photographiant de petits modèles comme les canetons, j’ai constaté qu’en m’abaissant au niveau du modèle, on permet à celui ou à celle qui regarde la photo de voir l’environnement selon le point de vue du modèle.

Lorsque quelqu’un s’approche sans le savoir de trop près du nid d’un chevalier grivelé, la femelle donne tout un spectacle. Elle lance rapidement des appels et survole la scène pour attirer l’attention. Et si vous vous rapprochez d’elle, elle vous conduit dans une direction pour vous éloigner du nid ou des oisillons.

Parfois, on ne sait jamais ce qu’on a capté avant de parcourir les images. Par exemple, sur cette photo, j’ai été étonné de voir que ce bruant chanteur s’était agrippé à deux branches d’arbres différentes et qu’il faisait le grand écart! Au cœur de Saint-Jean de Terre-Neuve, quelques bruants chanteurs peuvent survivre à l’hiver grâce aux milieux humides urbains, qui leur apportent couvert et gîte et qui les protègent contre les intempéries et les prédateurs.

Pour voir d’autres photos de Brendan Kelly sur Instagramme : @__brendankelly__
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