Suivre le courant
La recherche peut nous éclairer sur ce qui se déverse dans les bassins hydrographiques des Prairies, ainsi que sur le rôle que joue la nature dans la protection de la qualité de l’eau

« Je suis comme un enfant devant une flaque d’eau : je ne peux pas résister à l’attrait des écosystèmes aquatiques», lance Pascal Badiou, chercheur scientifique à l’Institut de recherche sur les humides et la sauvagine de CIC.
Depuis plus d’une dizaine d’années, il met au profit du riche paysage des Prairies, son expertise dans le domaine de l’eau et de ce qu’elle transporte. Ce printemps, son équipe de chercheurs terminera sa troisième et dernière année de surveillance du ruisseau Camrose, dans la région des prairies-parcs de l’Alberta. Il comparera les résultats de ses travaux à ceux des récents projets de recherche menés à Broughton’s Creek au Manitoba et à Smith Creek en Saskatchewan.
« Les milieux humides des Prairies canadiennes font partie des écosystèmes aquatiques les plus scientifiquement négligés dans le monde, précise M. Badiou. Nous savons que ces milieux humides font des merveilles dans l’élimination des contaminants. Nous devons continuer de quantifier à quel point ces systèmes sont importants pour réguler la qualité et la quantité de notre eau. »
Les travaux de recherche menés au ruisseau Camrose ont été parsemés d’embûches dans les deux premières années. À cause de l’enneigement minime, il y a eu peu de ruissellement de l’eau provenant du sol. Cette année, l’enneigement est plus important, ce qui donne à son équipe une excellente occasion de surveiller l’écoulement en aval.
Ce qu’il y a dans l’eau
À ce jour, les travaux de recherche démontrent que les milieux humides préservent la qualité de l’eau en éliminant les polluants emportés par les eaux de ruissellement. Les polluants sont décomposés, neutralisés et emmagasinés dans la végétation et les sédiments des milieux humides, ce qui donne de l’eau plus saine en aval.
« Dans les terres agricoles, les milieux humides affichent des taux grandement supérieurs d’azote, de phosphore et de pesticides, confie M. Badiou. Il est donc d’autant plus important de préserver ces milieux humides sur le territoire pour contrer ce type de pollution dans les terres agricoles. »
Avec la montée des niveaux de contaminants, les collectivités sont parfois aux prises avec d’autres difficultés liées à la qualité de l’eau.
« Nous savons que le drainage des milieux humides augmente la quantité de nutriments en aval, ce qui peut causer d’autres problèmes de qualité de l’eau. Il suffit de penser à la prolifération des algues dans le lac Winnipeg, le lac Diefenbaker et le lac Pigeon, déplore‑t‑il. Le phénomène s’étend à l’ensemble des Prairies. »

© CIC
Le lien avec la science
En menant des recherches dans ces modestes bassins hydrographiques, M. Badiou entend mieux démontrer les phénomènes qui se produisent lorsque nous apportons des changements aux systèmes naturels des Prairies, par exemple en drainant les milieux humides. Selon lui, en réunissant des données et en comptant sur des points de contact dans les trois provinces, la science pourra mieux démontrer l’importance des milieux humides pour toute la région.
« Même dans le grand bassin hydrographique, le drainage des milieux humides peut avoir un impact sur vous », conclut‑il.